Au printemps 1981, l’équipe de France se présentait au Parc des Princes avec une dynamique plutôt négative. Les Bleus venaient de s’incliner contre l’Espagne puis contre les Pays-Bas, avant d’obtenir une maigre victoire 3-2 (deux buts de Soler, un but de Six) face à la Belgique. Dans la foulée, la France allait enchaîner deux défaites à l'extérieur contre la Belgique puis l’Irlande, qui allaient inquiéter les observateurs. Bref, le moral n'était pas au plus haut au moment de recevoir le Brésil : sur le plan offensif comme défensif, le bilan du début 1981 était plutôt préoccupant.
Des absents côté français
Michel Hidalgo devait de surcroît composer sans plusieurs cadres habituels. Les forfaits s’accumulaient : Battiston, Giresse, Platini, Soler – l’homme en forme – ainsi que Rocheteau étaient absents. Pour pallier ces manques, Hidalgo aligna une équipe expérimentale : Jean Tigana, dont c’était seulement la 7ᵉ sélection, assumait un rôle de meneur, tandis qu’Alain Moizan se chargeait de la récupération. Anziani évoluait comme faux avant-centre et Hidalgo appella aussi Lecornu et Delamontagne qui rentreront en cours de match. Didier Six, entre Bruges et le Racing Club de Strasbourg à ce moment-là, était - évidemment- sur l’aile et, du côté français, on ne vit presque que lui : débordements, centres, à droite comme à gauche, dribbles chaloupés, frappes surprises… Six sortit l’arsenal complet. Le Brésil lui avait déjà bien réussi trois ans plus tôt au Maracanã (nul 2-2 avec un but extraordinaire) et il espérait bien recommencer.
Les Brésiliens, stars au sommet
La Seleção brésilienne, menée par le légendaire Telê Santana, affichait un état de forme radieux. Le Brésil venait de réussir un parcours parfait en qualifications pour le Mondial 1982 et restait sur une finale perdue au Mundialito contre l’Uruguay quelques mois plus tôt (écrasant la RFA 4-1 au passage). Santana prônait un jeu offensif séduisant, renouant avec le traditionnel jogo bonito. Sur la pelouse du Parc, l’équipe comptait plusieurs stars confirmées : Sócrates, Zico, Éder, Reinaldo et Paulo Isidoro illuminaient le secteur offensif, épaulés par Junior et Cerezo au milieu.
Le match
La rencontre tourna vite à l’avantage des Brésiliens. À la 21ᵉ minute, Sócrates combina avec Zico, qui ouvrit le score d’une frappe imparable après un contrôle magnifique. La défense française fut encore fragilisée par la sortie sur blessure de Marius Trésor. Quelques minutes plus tard, Éder déborda sur la gauche et centra pour Reinaldo, qui doubla la mise dans une défense française bien passive (0-2).
En seconde période, les Brésiliens poursuivirent leur démonstration. Dès la 52ᵉ minute, Zico expédia une somptueuse passe piquée pour Sócrates, qui conclut d’une volée superbe (0-3). Le Parc, sous le charme, applaudit la vista technique des visiteurs. Les Bleus tentèrent alors de réagir et, à la 81ᵉ minute, Didier Six, auteur d’un match flamboyant, tantôt à droite, tantôt à gauche, redonna un peu d’espoir en marquant d’un tir croisé du droit, consécutif à une action sur l’aile gauche (1-3). Quelques minutes plus tard, il plaça une tête plongeante magnifique sur le poteau : Delamontagne, surpris, tira au-dessus alors que le gardien brésilien était battu. Les Bleus avaient laissé passer leur chance de revenir à 3-2.
Quelques instants plus tard, frustré par une décision arbitrale et probablement par la maigre récompense de son excellent match, Didier Six adressa un bras d’honneur à l’arbitre de touche à la 89ᵉ minute. L’arbitre central n’hésita pas : carton rouge. Six quitta la pelouse en pleine controverse, transformant sa belle fin de match en incident regrettable.
Le score final est sans appel : France 1 – Brésil 3. Pour la France, ce fut la première défaite à domicile sous Michel Hidalgo (en 5 ans!), face à un Brésil au sommet de son art. La presse souligna le poids des absences françaises et encensa la prestation brésilienne. Quant à Didier Six, il restera comme le symbole de ce match paradoxal : auteur du seul but tricolore et d’un match formidable, mais expulsé dans la foulée pour un geste d’humeur. Un épisode de plus dans la trajectoire complexe d’un joueur ultra-doué.