Christian Perez

 

 
 

Avant le match [Yougoslavie-France], j'étais très angoissé parce qu'on ne sait pas où on va. C'est un autre milieu, c'est un autre niveau et le fait de marquer rapidement, putain, ça a été pour moi un soulagement et ça m'a donné une confiance extraordinaire. C'était une période où j'étais heureux vraiment.  J'étais presque moins bon avec le PSG que je ne l'étais avec l'équipe de France. Michel Platini vient me voir à un moment donné avant de sortir à l'échauffement.  Il me dit « mais tu sais que beaucoup de gens parlent de toi en Europe ? » et je me suis dit, « putain Perez, tu te sous-estimes peut-être un peu trop », mais ça me donnait quand même une grande confiance en moi. Le grand manque de ma vie de footballeur, ça sera que mon histoire avec le PSG, elle devait continuer, il n’était pas question que je signe ailleurs. Moi, j'étais heureux à Paris. Malheureusement, c'est un goût d'inachevé et je vous assure que il y a des nuits où je me réveille encore en me disant, « mais putain Perez, pourquoi tu t'es dépêché d'aller raconter que c'était comme ça et pas autrement…

— Christian Perez

 

 

Podcast des légendes : Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans un nouvel épisode du podcast des légendes.

Pilier du sélectionneur Platini, notre légende commence sa carrière internationale de manière tonitruante en marquant lors de sa toute première sélection après seulement trois minutes de jeu. Vif, rapide, précis, insaisissable, aussi létal que précoce puisqu'il a débuté en D1 à peine 16 ans. Ce meneur de jeu de poche devient rapidement la rampe de lancement et le pourvoyeur de ballons pour la paire d'attaquants que le monde nous envie. JPP et Cantona.

Bien que formé à Nîmes, ce feu follet fut plutôt vipère que crocodile dans sa capacité qu'il avait de foudroyer l'adversaire en un instant. Il a participé à l'exceptionnelle saison du promu montpelliérain en quatre-vingt-sept, quatre-vingt-huit avant de rejoindre le PSG, l'AS Monaco et de terminer sa carrière en Chine, non sans avoir fait partie de l'épopée nîmoise en National, qui le conduisit en finale de Coupe de France contre Auxerre après avoir éliminé trois équipes de division un. 

Il compte 22 sélections en équipe de France, dont 11 passes décisives et deux buts. Guillaume, ce joueur dont le surnom de Pépé ne correspondait pas du tout à son style de jeu, c'est …

Podcast des légendes : C'est Christian Perez évidemment.

Bonjour Christian.

Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation aujourd'hui. On est ravi, honoré, je pense que, en plus, pour être honnête, Christian, tu es un des joueurs préférés de Michel de cette époque. Donc pour lui, c'est (rires)

Podcast des légendes : C'est exceptionnel.

Christian Perez : Bonjour Michel

Podcast des légendes : Très heureux de t’avoir.

Podcast des légendes : L'idée Christian, c'est que tu sois à l'aise dans cet entretien, vraiment que tu te sentes comme chez toi. C’est une petite discussion au coin du feu, t'es dans le sud de la France donc on va dire au coin de la piscine et l’idée, c'est véritablement un entretien avec bienveillance et écoute. C’est ça qui me...

Christian Perez : Écoutez, il n'y a pas de problème. Je suis à l'agence où je travaille, mais il n'y a pas de piscine. Tout va bien, ne vous inquiétez pas.

Podcast des légendes : Christian, on espère qu'on va te permettre de terminer ta journée de travail avec plaisir.

La première question c'est : comment t'es venu la passion du foot ?

Christian Perez : Ouh là là, c'était bien jeune. Ça a démarré à Marseille puisque je suis natif de Marseille. Grâce à mon papa, on allait voir les matchs de l'OM et j'ai toujours été baigné dans le foot donc, ça a démarré très jeune la passion à tel point que quand on demandait le métier à chaque élève, je disais tout le temps footballeur professionnel. D’ailleurs en ce temps-là, évidemment la réponse était cinglante, ce n'était pas un métier. C'était la petite anecdote, mais c'est devenu très rapidement, très jeune en tout cas.

Podcast des légendes : A cette époque-là, t’es inscrit dans un club, tu joues de manière structurée, tu joues dans la cour de récré, etc.

Christian Perez : Non du tout, parce que, en fait, j'ai vécu jusqu'à l'âge de 8 ans à Marseille. Et puis nous sommes partis à Saint-Rémy-de-Provence. Et à 10, 9 ans, j'étais dans l'équipe de Saint-Rémy en tant que poussin.

Podcast des légendes : Quand tu joues en tant que poussin, est ce que t’es déjà un phénomène ? Est-ce que vraiment tu sens que tu es bien meilleur que les autres ?

Christian Perez : Oui, phénomène non, enfin je ne sais pas. En tout cas oui, on me fait comprendre que je suis plus fort que les autres.

Podcast des légendes : Et quelles sont les réactions familiales ? Est-ce que il y a une sorte d'engouement ? Est-ce que ta famille était fan de foot ? Est-ce que c'était un hobby ou est-ce qu’on sent la passion ?

Christian Perez : Non, mon papa était fan de foot. Oui, il aimait le football mon papa, mais il n'y avait pas cette, comment dire… cette effervescence autour d'un gamin qui est promu à une bonne, belle carrière, encore qu'il ne le savait pas.

La nouvelle génération que l'on est en ce moment, je pense que les parents, dès que ils sentent que leurs fils ont des capacités, ça y est, ils voient en lui la grosse carrière. De mon côté, c'était très calme, mais mon papa prenait sa voiture et me menait avec d'autres parents jouer au foot puisque je suis parti à Nîmes Olympique.

Podcast des légendes : C'est à quel âge que tu pars à Nîmes ?

Christian Perez : Je suis parti en cadet, première année à Nîmes Olympique et je faisais partie de l'équipe cadet de mémoire. Il faut faire travailler un peu les méninges puisque ça remonte assez loin, je faisais partie de l'équipe Gambardella en tout cas de l'équipe Cadet de Nîmes Olympique. J'avais quitté mon cocon Saint-Rémois et je rentrais dans une équipe, en tout cas dans un club professionnel.

Podcast des légendes :  Tu évoluais à quel poste quand tu étais en cadet justement au Nîmes Olympique ?

Christian Perez : Nîmes Olympique, j'étais ailier gauche

Podcast des légendes : À ce moment-là, tu habites à Nîmes où tu fais la navette ?  Comment ça se passe ?

Christian Perez : Oui, je fais la navette, je vis chez mes parents. Ensuite, j'intégrerai, je crois que c'est junior, le centre de formation de Nîmes Olympique.

Podcast des légendes : D'accord, Junior, juste pour nos auditeurs, c'est quoi ? C'est 13, 14 ans ?

Christian Perez : (rires…) oui, ça doit être 15 ans junior. Il faudrait regarder un petit peu dans les archives, mais oui, je pense que ça doit être quinze ans.

Podcast des légendes : D’accord. On regardera, on vérifiera.

Christian Perez : Je pense que ça doit être quinze ans et puis là, je commence. J’intègre le centre de formation deux ans après.

Podcast des légendes : Est-ce qu'à ce moment-là, tu peux imaginer que deux ans plus tard, tu vas débuter en première division. Est-ce que c'est dans le domaine du possible dans ta tête à ce moment-là ?

Christian Perez :  A aucun moment, on ne pense à ça. Maintenant, mon objectif, quand j'intègre le centre de formation, c'est d'être dans l'équipe première, c'est évident.

Podcast des légendes : Quand t’intègres le centre de formation à ce moment-là, est-ce que tu restes toujours chez tes parents, ou il y a un système où tu habites plus proche, plus près du centre de formation, voire dans le centre de formation ?

Christian Perez : On habite dans une villa où au premier étage, il y avait notre entraîneur, Monsieur Barnard Gué, avec son épouse et son fils qui s'occupaient de nous et il y avait mes collègues Jean et Bernar Ojula.

Podcast des légendes : il y avait eu Pierre Barlaguet. C'était vraiment le formateur entraîneur, un peu Old School qui était un peu avare de compliments.

Est- ce que c'était un peu le style qui te convenait à toi parce que c'est un peu un débat qu'on a sur le podcast, c’est de voir un petit peu à ton époque et aux époques précédentes, c'était toujours un peu à la dure, c'étaient des mots qui pouvait… Il fallait avoir une mentalité solide pour survivre au centre de formation.

Christian Perez : Survivre ? je n’irais pas jusque-là franchement parce que je sais qu'il nous aimait bien, en tout cas, il m’appréciait beaucoup. Maintenant, c'est vrai qu'il ne faisait pas de cadeau. Je me rappelle de certains matchs où j’étais passé à côté parce que, étant très jeune et on jouait contre des adultes très aguerris et plus vers la trentaine, m'être retrouvée avec des gens plutôt méchants et me cacher un petit peu. Il n'y avait aucune empathie. C'était bouche-toi le cul, bouge-toi les fesses parce que sinon ça va pas le faire. Rires

C'était un peu à la dure, mais on n'en est pas mort.

Podcast des légendes : Quelles sont les qualités qui sont à cette époque, celles qui font tilt pour Nîmes et qu'ils disent « on va le prendre Christian, il n’est pas mal »

Christian Perez : Je suppose qu’ils venaient me voir régulièrement à un moment donné, quand j'étais à Saint-Rémy. Il y a eu Monsieur Rooks qui faisait partie des deux secrétaires généraux du club de Nîmes Olympique qui a fait remonter l'information puis, ils sont venus me voir. Je suppose qu'ils ont aimé ma vivacité, mon pied gauche et puis je marquais des buts et j'avais une belle passe décisive, je suppose. J'avais les qualités au-dessus de la moyenne.

Podcast des légendes : Et il y a un joueur en particulier que tu admires à l'époque ?

Christian Perez : Oui, à cette époque très jeune, on est attaché à… Moi, j'avais Pelé bien sûr, Yohan Cruyff, j'adorais son style de jeu, mais ma première idole, ça a été Josip Skoblar qui jouait avant-centre à Marseille. J'ai eu la chance de le croiser en Corse pour un match amical avec Monaco. C'était un très joli moment parce qu’on se croise, on se tutoie et puis c'est ça fait drôle, mais en même temps, c'est chaleureux, c'est agréable.

Podcast des légendes : Et il t’avait reconnu à l’époque ?

Christian Perez : Oui, il ne connaissait puisque moi, j'étais dans l'équipe de Monaco quand même international donc il me connaissait. Je l'ai vu sur le tard. Je l'ai vu presque à la fin de ma carrière.

Podcast des légendes : D’accord, on va revenir au début. Ton premier match arrive très tôt alors, je ne sais pas où tu te situes dans les livres de records en première division, mais tu dois être quand même assez haut puisque tu commences à 16 ans et neuf mois, je crois.

Christian Perez : Il faudrait revoir, je ne suis pas quelqu'un qui garde un souvenir plein de choses de sa carrière, mais je pense que j'aurais dit dans les 17 ans, je me rappelle, c'était contre Laval.

Podcast des légendes : Exactement ouais, contre Laval, 2- 0. Tu joues, est-ce que tu te souviens de ce que te dis l'entraîneur quand il t’annonce que tu vas commencer ?

Christian Perez : Non, mais il m'a dit joue ton jeu, je suppose. Il m’a dit n’ait pas peur, ça va bien se passer. Il y avait des joueurs chevronnés qui m'ont pris sous leur coupe derrière. Il y avait René Girard. Il y avait Marguerite, il y avait Laurent Viaud me semble-t-il. Je sais plus si Laurent Viaud était encore là, mais il y avait des joueurs qui étaient en ce temps-là. C'étaient des gens qui prenaient soin de toi sur le terrain plutôt qu’eux.

J'avais confiance en moi. C'est vrai qu'avant le match, j'ai eu un peu le trac, ce qui est normal, mais j'étais aussi confiant. Je ne pense pas avoir fait le meilleur match de ma vie, mais c'était agréable.

Podcast des légendes : Tu parlais justement des anciens qui te couvaient avec une certaine bienveillance. Tu débutes, je rappelle, t’as même pas 17 ans dans une Division un qui est quand même à l'époque assez rugueuse, on va dire, les attaquants sont pas du tout… C'est très âpre, les attaquants ne sont pas du tout protégés.

On a eu des anciens défenseurs sur le programme qui parlaient un petit peu de la façon dont ils aimaient bien intimider verbalement ou physiquement les attaquants. Comment est-ce que toi, à cet âge-là, tu gères les intimidations verbales, physiques, etc...

Est-ce que tu fais appel au René Girard qui n'étaient pas des rigolos ou est-ce que tu te débrouilles tout seul ? Comment ça se passe ?

 Christian Perez : En fait, ça ne se passe pas comme dans un film où on dit René vient m’aider, je suis emmerdée, non. René Girard et je cite d'autres, il y avait Bernard Boissier, il y avait Denis Jouanne. C’est des gens qui, quand ils rentraient sur le terrain, ils étaient très agressifs et il n'était pas question qu'on touche un des leurs.

Podcast des légendes : D'accord

Christian Perez : A cette époque, je n'étais pas quand même un titulaire à part entière dans cette équipe. J'ai fait deux ou trois apparitions, mais je ne jouais pas avec eux régulièrement. Tu te débrouilles tout seul. J'ai eu des périodes où un jour, je joue au CAB de Bastia, contre le CAB de Bastia. Le coup d'envoi est donné, il y a l'arrière droit, il s'approche de moi, il devait avoir trente ans, moi, j'en avais 15 peut-être. Il me met un coup de poing dans (Rires), pas très fort, mais pour me dire aujourd'hui, tu te calmes.

Podcast des légendes : Le match n’est pas encore commencé ?

Christian Perez :  C’était comme ça, le match est commencé et coup d'envoi Boom. J'ai pris un petit corgnole et (rires)… Ça fait drôle parce qu’on n'est pas préparé à ça, on ne joue pas au football pour ça.

Podcast des légendes : Ceci dit, Nîmes était quand même connu aussi pour la rugosité de son arrière-garde et son public aussi assez chaud donc il n'y avait pas…

Il n’y avait vraiment aucune préparation psychologique pour ça ?

Christian Perez : Non, mais en même temps, j'aimais bien ces ambiances. J'ai été formé dans un stade de Nîmes Olympique, le stade Jean-Bouin. On était formé pour ce type d'ambiance très chaude. On savait que les joueurs quand ils rentraient sur le terrain, ils étaient blancs dans le tunnel, mais quand ça se passe à l'extérieur et quand tu es jeune comme ça, à un moment donné, tu fais avec, mais tu prends des coups. Moi, j'ai pris des coups et l'arbitrage était différent de ce qu'il est aujourd'hui.

Podcast des légendes : Si tu devais caractériser le pire défenseur contre lequel tu as joué, ce serait qui lors de ta carrière parce que tu as joué, je rappelle à l'époque où il y avait l'arrière garde marseillaise, qui était composé de boucher et il y avait des Parisiens aussi, qui était assez rugueux.

Est-ce que t’en as que tu sors du lot rétrospectivement ?

Christian Perez :  Non. Écoutez, j'ai joué à Bastia contre Jean-Louis Cazes qui ne fait pas partie des tendres. Vous savez, quand vous êtes en forme, il n'y a pas de soucis. Vu mon gabarit, il valait mieux que je sois en forme parce qu'il y a des périodes où tu es plus ou moins fatiguer, pas très bien et avec soixante kilos, t’as plus de mal à te faire respecter. Tu ne peux pas lutter physiquement, donc si tu n’es pas bien physiquement, tu exploses. 

Oui, il y a des joueurs que j'ai craints quand même à un moment donné : José Anigo, je le dis toujours, il m'a fait peur (rires…). J'ai joué aussi contre Murray en troisième division où franchement, j'ai pris des coups. Je suis sorti sur blessure parce que c'étaient des bouchers. On a la chance de ne pas être blessé très gravement.

Podcast des légendes : Tu évoquais Christian, les défenseurs, mais qui étaient un peu rugueux et qui sont d'une autre époque. Je pense que si les terrains de foot étaient pas toujours d'une grande qualité, quand on est attaquant, on sait que c’est quand même relativement important de jouer plutôt sur un billard.

Est-ce que t’as des souvenirs justement de terrain tellement impraticable que ça en devenait indécent ou en tout cas dangereux ?

Christian Perez : J’ai joué sur tous les terrains. J’ai joué sur des terrains très enneigés avec le bataillon de Joinville.  J'ai joué sur des terrains de troisième division stabilisés.

J'ai joué sur des terrains pourris en saison hivernale. En première division, qu’est-ce qu’il y avait ? Laval. En ce temps-là, les pelouses n'étaient pas terribles. Après, quand vous allez au PSG, la pelouse restait quand même en très bon état. Vous savez, Monaco qui a eu pendant longtemps des terrains exécrables à cause du parking souterrain où je ne sais pas.

Podcast des légendes : Exactement Christian, c'était le parking qui était juste en dessous…

Christian Perez : Très franchement, en ce temps-là, on n'était pas des enfants gâtés et on ne va pas faire les anciens combattants. On n'avait pas le choix. C'était comme ça qu’on jouait et puis basta. J'ai joué en Albanie en équipe de France, le terrain était pourri.

Podcast des légendes : J'ai revu les images de ton premier match en équipe de France contre la Yougoslavie et c'était un champ de patates.

Christian Perez : Oui, c'était en Yougoslavie, mais en Albanie. Si vous revoyez les images, le terrain, c'est un terrain de pourri et pourtant on est en équipe de France. Le football a changé, c'est un autre univers, ça n'a plus rien à avoir avec ce qu'on a connu nous.

Podcast des légendes : Tu débutes contre Laval, combien de temps, il te faut pour t'installer durablement dans le onze des titulaires ?

Christian Perez : Écoutez, on va passer cette saison-là, la saison suivante et je pense qu'après, je suis devenu titulaire, c'est-à-dire c'est quand on est descendu en deuxième division. Je deviens titulaire. On remonte à quand Monsieur Cacharel, Monsieur Bousquet est venu en tant que président et maire de Nîmes. On remonte en D1.  Malheureusement, on a un recrutement qui est pas à la hauteur pour rester en Division un et après, on va végéter pendant deux, trois ans en D2 et je suis parti.

Podcast des légendes : Tu pars ensuite à Montpellier qui pour le coup vient d'être promue en première division. Avec le président Nicolas, c'est en été quatre-vingt-sept. Pour revenir un petit peu en avant, comment est-ce que tu négocies ton premier salaire quand tu es à Nîmes et comment tu négocies ton transfert à Montpellier ? Est-ce que t’as un agent ou est-ce que tu fais tout, tout seul ?

Christian Perez :  Non, je suis tout seul jusqu'à Nîmes Olympique, c'est-à-dire, j'ai négocié tout seul avec monsieur Bousquet. Les salaires en ce temps-là, c’était… On essayait de gratter le maximum et après, j'ai eu un agent qui m'a négocié le contrat à Nîmes Olympique et puis pour aller au PSG et ensuite, trois ans après, je m'en suis séparé, j'ai pris un autre agent.

Podcast des légendes : D'accord. Quand tu négocies ton premier salaire, tu parlais de Monsieur Bousquet qui était maire, c'est ça il me semble donc, quelqu’un qui était président et maire, Quelqu'un qui était vraiment expérimenté dans la négociation ? Comment est-ce que… T’avais, j'imagine moins de vingt ans. (rires)

Comment est-ce que tu te prépares pour une telle négociation ?

Christian Perez : Je ne me suis pas préparée. C'est quand on se renseigne un petit peu, ce qu'on peut espérer gagner quand on est jeune, quand on joue à Nîmes Olympique, quand on galère un peu en D2, donc on a profité de la montée en première division. Pour tout vous dire, je crois qu'avec Claude Goudard, on a eu le même salaire en même temps parce que ils estimaient qu'on était de même valeur et je crois que c'est équivalent. Je ne me rappelle même plus le salaire, mais ça n'allait pas bien loin.

Podcast des légendes : D'accord.

Christian Perez : On s'est débrouillé tout seul dans les premiers contrats.

Podcast des légendes : Quand tu fais l'ascenseur, division un, division deux avec Nîmes Olympique, quand tu redescends, est-ce que t'as pas des velléités de départ dès ce moment-là ?

Christian Perez : Si je souhaite partir très rapidement, mais on me fait comprendre que c'est Claude Goudard qui partira en premier et moi non.

Podcast des légendes : D'accord et pourquoi ?

Christian Perez : S'ils se séparent de deux, il se pose le problème de plus d'ailier droit, plus d'ailier gauche et puis on faisait quand même partie des joueurs importants donc, on me fait comprendre que le prochain train, ce n'est pas pour moi. (rires)

Podcast des légendes : C’est quoi ton sentiment quand t’apprends que tu dois attendre ton tour ?

Christian Perez : Je reste et puis ça ne me pose aucun problème. À partir du moment où tu as un contrat, tu le respectes, donc on me demande de rester, je reste. Je passe une belle année puisque je crois que je suis meilleur buteur du club et ensuite, j'ai des gens que j'aime beaucoup, moutas améri pour pas le citer, on devient ami. Voilà des rencontres humaines, ce qui est aussi assez agréable quand le club ne marche pas comme vous le souhaitez.

Podcast des légendes :  Tu pars à Montpellier, outre le fait bien sûr qu'ils sont en première division. Quels sont les critères qui te décide à aller là-bas ?

Christian Perez : Moi, je veux jouer en première division et je pense que Michel Mézy qui est un ancien Nîmois à des vues sur moi. Je pars à Montpellier chez le voisin montpelliérain et je suis très content, même si c'est l'animosité entre les deux clubs, même si ce n’est pas très grave. Dans mon esprit se passe pour la première année, une Première saison, super.

Podcast des légendes :  Alors justement, je crois que cette équipe à une attaque de feu. Vous marquez, il me semble, près de soixante-dix buts en une saison. Vous terminez troisième alors que vous êtes promu, ce qui est assez exceptionnel quand on voit les cylindrées de l'époque.

Première question : Est-ce que tu as d'autres offres que celle de Montpellier ?

Christian Perez : Oui, j'ai d'autres offres, mais des offres qui ne m'intéressent pas. De mémoire, très franchement, je ne pourrais pas vous dire lesquelles, mais c'est sûr que partie à Montpellier, ça m'intéressait parce que c'était peut-être pas très loin de Nîmes. Dans un premier temps, partie à Montpellier, ça me plaisait bien.  

Podcast des légendes : Club ambitieux, ambiance familiale, effectivement pas loin de Nîmes, ça correspondait un peu à pas mal de critères.

Christian Perez: Exactement, la famille pas très loin donc voilà.

Podcast des légendes : Par rapport à tout ce que tu dis, tu pars au PSG après seulement un an.

Christian Perez : Là, c'est très simple, c'est pas de mon fait. Je suis en vacances au Club Méditerranée, à Vittel pour tout vous dire, et à la télé, on apprend que Bruno Bellone que je connaissais très bien, on était dans les sélections en équipe de France de jeunes et au bataillon de Joinville et j'apprends qu'il signe à Montpellier. Comme on joue à peu près le même poste, même si Bruno ce n'est pas faire offense aux joueurs, il était plutôt dans une pente descendante. Je ne comprends plus et j'appelle mon agent et je lui demande des explications et je lui dis de rentrer en contact direct avec Montpellier et qu'il n'est pas question que je fasse une doublure ou quoi que ce soit, il n'en était pas question.

Il y a des joueurs dans la vie, c'est pas pour faire le calimero, c'est que certain tout leur est permis, il n'y a aucun soucis et puis, il y en a d'autres, il faut qu'ils se battent tout le temps et je fais partie de ces gens-là à qui on gratte toujours quelque chose dans la tête pour savoir. On prend Bruno. Pour la raison, je ne la connais pas du tout donc moi, je pars du principe que je suis offensé et je demande à avoir une explication et on me dit que c'est comme ça et qu'on va me transférer à Metz.

Podcast des légendes : A Metz ?  

Christian Perez : Oui, à Metz

Podcast des légendes : En tant que Strasbourgeois, je confirme que c'est le pire club de France.

Christian Perez : (Rires)

Encore une fois, je n'ai rien contre le club de Metz, mais je ne vois pas pourquoi, avec la saison que je faisais, je devais partir vers le club de Metz donc j'ai refusé et j'ai été privé de stage et donc j'ai eu un appel de Monsieur Borelli qui me demande si je serai d'accord pour faire un essai.

Vous vous rendez compte ? Je suis obligé d'aller faire un essai au PSG pour espérer quand il jouait une carrière somme toute, qui est promise à un bel avenir, mais à un moment donné, on se demande ce qu'on a fait au bon Dieu. Mais je pars quand même, parce que pour moi, je pense que c’est une belle opportunité.

Podcast des légendes : Je rappelle que tu apprends l'arrivée de Bellone à Montpellier, donc plus ou moins à ta place, à la télé. Personne ne te prévient ?

Christian Perez : Non, pas du tout. Je suis au Club Med et je sais pas, je tombe là-dessus et là, je m'inquiète un petit peu et je me mets en colère. (Rires)

Podcast des légendes : Est-ce que tu as un caractère plutôt sanguin ou tu as un caractère plutôt calme justement à cette époque-là.

Christian Perez : Non, mais pas forcément. Je ne suis pas sanguin, mais je prends beaucoup plus jeune des décisions radicales. Moi, c'est oui, soit non et je me casse avec les conséquences qu’on verra plus tard catastrophique pour ma carrière.

Podcast des légendes : Quelque part, c’est ton caractère aussi qui agit dans ce cas de Montpellier ? C'est « vous m'avez manqué de respect, vous ne me donnez pas d'explications, Ciao Bambino » ?

Christian Perez : Oui

Podcast des légendes : Rétrospectivement, tu penses que tu aurais pu coexister avec Bellone ?

Christian Perez : je ne vois pas l'intérêt de mettre Bruno Bellone avec moi. Pourquoi faire ? Non, parce qu'en ce temps-là, on n'est pas 50 sur le banc de touche. Avec le grand respect que j'ai pour Bruno, non. Ce temps-là, il allait plus bien dans le football, en tout cas dans sa carrière ça n’allait pas du tout, ce n’était pas sérieux. Vous voyez ce que je veux dire ? Il y aurait un grand joueur qui vienne, mais c'était pas cohérent, donc j'en ai déduit qu'ils avaient plus envie que je joue.  

Podcast des légendes : Donc, est-ce que tu mets ta fierté de côté si je peux me permettre pour faire l'essai au PSG ? Comment ça se passe ?

Christian Perez : Ouais, malgré tout, je ne suis pas quelqu'un de très compliqué à gérer. Je mets ma fierté de côté. Maintenant, je me dis « merde, c'est quand même le PSG qui te propose de venir faire un essai » et si t’es pas trop mauvais, tu vas leur prouver et en trente minutes, je prouve à Monsieur…

Podcast des légendes : Est-ce que tu peux nous décrire un peu ce… parce que effectivement, tu parlais de films. On a un peu l'impression que c'est assez cinématographique comme moment.

Christian Perez : J’y vais. Tu fais aux lignes sur le tapis, c'est soit tu réussis et tout, tu as le trac et tu exploses ta carrière parce que de retour à Montpellier, tu sais pas comment ça va se passer.  

Podcast des légendes : Comment tu te hype pour utiliser une expression américaine, est-ce que tu as besoin de te chauffer ? Quel est ton… Ça paraît juste extraordinaire parce que là, pour le coup, comme tu dis, c'est presque, tu joues ta carrière à pile ou face là.  

Christian Perez : Complètement, là je monte, je dis à ma femme, tu me prends mon petit sac, je me casse, j'ai rendez-vous dans deux jours pour jouer contre le Santos, je crois ou je ne sais pas une équipe du tournoi. A ce moment-là, il y avait le tournoi de Paris et je joue titulaire de mémoire, le premier match et Monsieur Ivic qui dit à Monsieur Borelli en trente minutes, je le veux.

Podcast des légendes : D'accord. Tu avais plus ou moins quand même bien réussi ton essai ?

Christian Perez : Ouais, j’étais remonté comme un coucou et comme j'étais en ce temps-là rancunier, j'ai tout donné et je me suis dit je vous réserve mon Dieu de la vieille. J'étais assez en colère et j'étais heureux d'être à Paris.

Podcast des légendes : Christian, si je peux me permettre, tu viens de Nîmes dont l'ennemi intime, c'est un peu Montpellier, tu es trahi par Montpellier, y a-t-il une surprise quelque part ?

Christian Perez : Oui, mais c'est une impression parce qu'on ne sait jamais le mot de la fin. Oui, je me sens trahi et donc je pars à Paris et il y a tout qui me sourit.

Podcast des légendes : Effectivement, quand tu arrives à Paris, tu arrives là-bas pour le début de la saison, quatre-vingt-huit, quatre-vingt-neuf et trois mois plus tard, tu es appelé en équipe de France.

Christian Perez : C’est toute l'énigme du football, on passe de… On te demande de partir à Metz, peut-être là-bas, tu t’effondres parce que ça te va pas et tu choisis une autre voie, une autre issue en prenant quelques risques et tu te retrouves international au bout de trois mois.

Podcast des légendes : Tu disais un petit peu avant que tu avais fait les sélections juniors, etc. T’étais pas inconnu, je dirais des radars de la fédération.

Christian Perez : J'ai fait toutes les sélections possibles et imaginables. J'ai fait cadet, première année, deuxième, junior, espoir, bataillon de joinville…

Podcast des légendes : Est-ce que tu peux nous parler un peu du bataillon de Joinville ? On avait eu William prunier il y a quelques semaines, qui nous disait combien il avait eu vraiment une super expérience là-bas.

Est-ce que tu peux écrire pour nos auditeurs qui ne savent même pas ce que c'est que le service militaire puisque il a été aboli, je rappelle en quatre-vingt-seize, ma génération d'ailleurs. On a été très heureux que ça se passe.

Podcast des légendes : C'est en 2000, 2001 je crois, c’est sa promesse de campagne.

Podcast des légendes : Effectivement, comme le dit Christian, c'est la promesse de campagne de Chirac en quatre-vingt-quinze

Christian Perez : J'ai passé une belle année, très franchement en ce qui me concerne, c'était tous les jours à la caserne. On faisait la première… Les trois premières semaines, ont fait la vraie armée, c'est-à-dire ont fait nos classes. Tu te retrouves en chambre avec des gens qui sont un peu différents. Tu pars marcher pendant deux heures et ils reviennent. Au bout de la fin, tu commences à dire, mais pourquoi tu ne te laves pas, tu as transpiré et voilà.  

On est avec des gens. Nous aussi, on est des vraies gens, mais il y a des choses qui sont un peu bizarroïdes pour nous, mais en même temps des gens sympas et une fois nos classes finies, on part chacun, enfin, les footballeurs partent dans un réfectoire où il y a nos chambres. On est séparé.

Podcast des légendes : Pour le reste, effectivement, vous n'êtes pas… Il y a un régime un peu particulier pour les footballeurs, mais, vous êtes quand même obligé de vous mixer avec la population.  

Christian Perez : Oui, mais si tu as la chance et moi, je n'avais pas cette chance-là. Si tu as la chance d'être en première division et pouvoir faire deux matches dans la semaine, tu n'es pas obligé d'aller à l'armée. En tout cas, tu n'es pas obligé de repartir à Fontainebleau et ça, c'était une chance pour certains. Moi, j'étais en deuxième division, donc…

Podcast des légendes : Tu es avec qui dans tes classes au bataillon de Joinville ? Est-ce qu’il y a des personnes un peu connues ou tu étais le seul ?

Christian Perez : Non. Dans les classes, on n'est pas les seuls. Pour faire nos classes, j'étais avec Primare de Saint-Etienne, il y avait Philippe Tourdet, il y avait quelques joueurs, mais il n’y avait que des joueurs relativement connus ou inconnus.

Moi, j'étais avec Gaëtan Huard, il y avait Bellone, il y avait Daniel Bravo, il y avait deux fratères Joel et Thierry Gourdet, et je sais pas qui il y avait encore. Fournier, je crois, je sais plus, mais il n’y avait que des joueurs de foot.

Podcast des légendes : D'accord et tu fais partie de l'équipe de France militaire à moment-là ?

Christian Perez : Oui, on fait le challenge Kentish avec l'équipe de France militaire

Podcast des légendes : Là, tu es avec Bruno et Bellone en militaire, c’est rigolo.

Christian Perez : Bruno, Daniel Bravo, il y avait Gaëtan Huard, il n'y avait que des joueurs pros.

Podcast des légendes : C'est quand même rigolo que tu te retrouves au bataillon de Joinville avec Bruno et Bellone qui n'est pas responsable de ton départ de Montpellier, mais qui explique une partie du départ de Montpellier.

Christian Perez : Oui, mais Bruno, c'est quelqu'un que j'aime bien. Attention, je n’ai pas du tout d'animosité envers Bruno et même en ce temps-là, quand il doit venir à Montpellier, non, c'est pas à lui que j'en veux. 

Podcast des légendes : Est-ce que t’as appris quelque chose de vraiment utile au bataillon de Joinville c’est-à-dire est-ce que quand tu as fait ton armée après un an d'armée, tu te dis heureusement que je l'ai fait parce que j'ai quand même appris des trucs un peu incroyables.

Christian Perez : Non, pas du tout. (Rires)

J’étais quelqu’un de structuré et normalement, on va dire que je suis relevé relativement tôt, je faisais mon lit, je me suis toujours lavé correctement. (Rires)

Je ne sais pas ce qu’apprend l'armée. Pour les gens qui ont oublié ça, je pense que ça pourrait peut-être leur faire du bien. Mais pour moi, non, je n'ai pas perdu une année parce que j'ai continué à m'entraîner tous les jours, mais s'il avait fallu que je perde mon entraînement pendant un an, oui, ça n'aurait servi à rien du tout, mais là, c'était être loin de ma fiancée, c'était loin de qui va devenir ma femme, c'était loin de mon club parce que quand t’es pas dans le club, tu ne t’entraines pas avec le club donc je sais que tu peux perdre ta place.

Podcast des légendes : On termine cette petite digression sur le bataillon de Joinville. Tu viens de faire ton essai au PSG, le PSG te veux, tu séduis Ivic et Borelli assez rapidement et trois mois plus tard première sélection en équipe de France. Sachant que tu avais fait toutes les sélections avant, j'imagine que c'était quand même dans un petit coin de ta tête à ce moment-là que la sélection A devait finir par arriver au bout d'un moment.

Christian Perez : Non. Très sincèrement, cette période, il faut être dans un grand club pour être international ou alors être super fort, ce que je n'étais pas donc, arrivé à Paris, le club marchait. On a fait une très belle saison. Moi, je flambe, oui ça me paraissait évident. On y croit, mais on se dit qu’on n'y pense pas plus que ça et un jour on vous annonce. Moi, c'est Joël Bats qui est venu me voir en me disant Christian, tu vas être sélectionné alors, je lui dis non, arrête, je ne te crois pas et en fait, il était au courant de ma sélection.